jeudi 16 mai 2013

Voyage en viticulture et en peinture - Visites de chais 3

Samedi 4 mai. Au domaine Marchand, c’est une famille au grand complet qui expose le travail de Stéphanie Ludet. En l’absence de Clément, ce sont ses deux frères et sa femme qui nous accueillent dans un dédale de trois petites caves sombres. Dans leurs entrailles sont exposées les œuvres de l’artiste venue de Lima. Dans la précipitation de son départ, Stéphanie a emporté des petits formats encadrés (pastel gras) et des papiers (techniques mixtes).
Son œuvre figurative très intimiste, nourrie de ses nombreux voyages (Vietnam, Maroc, Chypre, Afrique, Inde, Pérou) et de son vécu a séduit la famille qui a choisi cette artiste à l’unanimité après avoir visionné son travail et écouté ses vidéos sur Internet.
« Ce qui nous a plu d’emblée, c’est sa vie faite de voyages, mais c’est aussi le fait d’accueillir chez nous une artiste venue d’ailleurs : lui faire partager notre vie, apprendre sur la sienne et sur sa vision de l’art. Sa peinture nous a émus par son imaginaire et par ses couleurs chaleureuses. »
Pour cette famille pour qui l’art contemporain n’était a priori pas un domaine de prédilection, l’expérience est une réussite. Une vraie rencontre. L’émotion est à fleur de peau chez l’artiste, dans ses tableaux et dans le regard des vignerons.
« On laisse le vin se faire le plus naturellement possible. On essaye de laisser s’exprimer le terroir avec beaucoup de finesse et de féminité », explique l’un des frères. C’est exactement ce que vit Stéphanie Ludet dans l’acte de peindre : Le peinture est en moi, je suis portée par le moyen d’expression. Surgissent sur le papier des visages et des corps issus du passé et du présent.»
Le prix Zeuxis a ému aux larmes Madame Marchand. Quant au père, il a « adopté » 
Stéphanie.

En haut, la famille Marchand sans le père qui faisait la sieste et sans Clément, en bas Stéphanie Ludet entourée de son père 



































Monsieur et Madame Marchand, dans leur chais, le soir de la remise du prix Zeuxis
































Nous quittons le chai, retrouvons la lumière, et nous nous rinçons l’œil devant la beauté des paysages, bords de Loire et champs de colza, avant de découvrir avec un œil neuf le très beau travail d’aquarelle de Leslie Greene.




















Autant le chai du domaine Marchand était ancien, sombre et petit, autant le hall de réception du Domaine Gaudry est grand, moderne et très lumineux. Et le travail de Leslie Greene est lumineux. Encore une belle alchimie entre le lieu d’exposition et les œuvres, le vigneron et l’artiste. « J’aime travailler la sensation, j’adore la légèreté, la spontanéité du geste. Avec l’aquarelle, on ne peut retravailler. J’aime cette posture entre une sorte de contrôle et l’absence de contrôle. J’aime aussi la qualité des couleurs de l’aquarelle », commente cette artiste née aux Etats-Unis.
De son côté, Nicolas Gaudry, vigneron, réalise un vin différent de son père au niveau de la culture des sols, de la sélection des terroirs et de la vinification. « Je crée un vin qui me ressemble tout comme Leslie essaye de retranscrire des formes et des couleurs à son image » Dans sa quête d’obtention d’un résultat pour que la vigne s’exprime au mieux, il oscille, lui aussi, entre le contrôle et l’absence de contrôle. Entre les deux, une connivence est née. Ils se retrouvent chacun dans la solitude de la création et le partage du produit ou de l’œuvre. Ensemble, ils ont visité d’autres chais. « C’est sympa de voir des vignerons heureux de se rencontrer, de déguster ensemble, d’échanger autour de leurs vins et de peinture aussi ! », raconte Leslie Greene.
Un petit verre avant de repartir et d’humer un massif floral qui sent délicieusement bon à l’entrée du chai. C’est là que nous rencontrons des visiteurs motivés par la FIAAC dans les chais en Pouilly Fumé qu’ils parcourent à vélo. Les commentaires vont bon train pour tenter de découvrir les arômes et le nom de ces fleurs. Ce sont des boules de neige.
Leslie Greene et Nicolas Gaudry




























































A nouveau le jaune éclatant des champs de colza et la chaleur de l’été. En route vers le Domaine Caïlbourdin. A nouveau la surprise. Le chai est très grand et moderne. L’exposition de Marine Vu se déploie dans plusieurs salles jouant des cuves et des box pour aboutir à un caveau aux couleurs chaudes, habillé d'un mur de pierres et dans lequel des barriques de vins ont été installées.
Un bel accrochage concocté par Alain Caïlbourdin, amateur d’art, et l'artiste. L’alliance entre les couleurs des toiles et les couleurs du chai est saisissante. Un heureux hasard. Marine Vu « interroge la relation de couple (Barack et Michelle Obama, DSK et Anne Sinclair, des célébrités mais aussi des anonymes) et la complexité des liens intimes entre présence et absence. Qu’est ce qui se cache, qu’est ce qui se montre ? » L’artiste travaille essentiellement à partir de photos. « Chaque image est ambiguë, porte le contraire de ce qu’elle pourrait représenter. »
Pour Alain Caïlbourdin, « les métiers de vigneron et d’artiste sont proches par leur côté intuitif, empirique et technique. Goûter un vin et apprécier une œuvre d’art relève d’une même approche, perceptive d’abord, puis compréhensive. » Rien de tel qu’une dégustation complète de ses quatre cuvées pour percevoir et ressentir les goûts, puis s’intéresser aux assemblages. Il nous présente les « Cris » comme un vin « tendu » … Comme une toile de peinture …


























































Au Domaine de Chauveau sur la butte de Saint-Andelain, nous découvrons le domaine où Benoît et Emmanuelle, passionnée de chevaux, accueillent l’exposition d’Arnold Livingstone. Une explosion de couleurs jaillit de tous les tableaux au format carré. La couleur dans tous ses états, lissée, brossée, griffée, raclée, projetée, mate, brillante. L’artiste se laisse aussi inspirer par des mots, des objets, des animaux ou des souvenirs de voyages.
Très heureux de cette expérience, l’artiste et sa femme nous racontent leur étonnement d’avoir vu tant de monde en ce samedi entrer dans le chai. « Ces trois jours ont été intenses aussi bien dans la relation avec les vignerons qu’avec les visiteurs. Pour certains, c’était la première fois qu’ils entraient dans un chai et qu’en plus ils découvraient de l’art abstrait. L’occasion d’échanges très riches artistiquement et humainement. »
Arnold Livingstone entouré d'Emmanuelle et de Benoît Chauveau


































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Marie-Laure Wallon
Texte et photos
ml.wallon@free.fr
06 82 84 25 11

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